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Licenciement des fonctionnaires hospitaliers : un décret sera pris sur injonction du Conseil d’État

Dans un courrier daté du 2 janvier et qu’Acteurs publics a pu consulter, la directrice générale de l’offre de soins (DGOS), Cécile Courrèges, indique que le gouvernement prendra prochainement le décret régissant les procédures de reclassement et, le cas échant, le licenciement des fonctionnaires hospitaliers dont l’emploi est supprimé. Suite à une injonction du Conseil d’État, l’exécutif a jusqu’au mois de mai pour élaborer ce texte.

Conseil d’État reçu cinq sur cinq. Le gouvernement s’apprête à préciser par voie de décret le régime de prise en charge des fonctionnaires hospitaliers dont l’emploi est supprimé et, le cas échéant, leur licenciement. C’était en effet une injonction du Palais-Royal. Dans un arrêt rendu le 25 octobre dernier, les magistrats administratifs avaient enjoint le Premier ministre de prendre, dans un délai de six mois (soit avant le mois de mai prochain), un décret d’application prévu par la loi de 1986 sur le statut de la fonction publique hospitalière encadrant ces procédures de reclassement et de licenciement. Depuis lors, soit plus d’une trentaine d’années, aucun texte n’a été publié.

La ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, est “à présent placée devant une injonction […], il est nécessaire à présent d’élaborer les dispositions requises par le Conseil d’État”, souligne ainsi la directrice générale de l’offre de soins (DGOS), Cécile Courrèges, dans un courrier reçu mardi 9 janvier par le secrétaire général de la branche “Santé” de Force ouvrière, Denis Basset. L’occasion ainsi pour la haute fonctionnaire d’officialiser des propos qu’elle avait déjà tenus le 20 décembre 2017, lors d’une séance plénière du Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière.

Cette lettre, dont Acteurs publics a obtenu copie, fait suite à une interpellation du même syndicaliste en fin d’année dernière. Dans un courrier daté du 23 novembre 2017, Denis Basset demandait alors à la ministre “de ne pas présenter un tel projet de décret”, qui “serait vécu par les personnels comme une véritable provocation”. “Ce serait la première fois depuis 1986, date du Statut, qu’un gouvernement oserait passer à l’acte sur le licenciement des titulaires”, soulignait-il, regrettant notamment une concordance entre certaines rumeurs quant à une éventuelle présentation d’un texte, la mise en place des groupements hospitaliers de territoire (GHT) propice à des mobilités, ainsi que la recherche d’économies de l’ordre de 4,2 milliards d’euros dans le budget 2018 de la Sécurité sociale. Des d’inquiétudes (restées sans réponse jusqu’alors) qui ne semblent donc pas avoir été entendues par le gouvernement.

Apporter une sécurité juridique

“Encadrer les délais, la procédure et la qualité des offres de reclassement apporte une visibilité et une sécurité juridique pour le fonctionnaire concerné”, indique la DGOS dans son courrier. Ces propos sont peu ou prou similaires à ceux de la CFDT Santé Sociaux des Hauts-de-Seine, à l’origine du recours devant le Conseil d’État. La décision des magistrats, “c’est l’espoir de permettre à l’avenir à tous les fonctionnaires hospitaliers de bénéficier d’une réelle protection contre le licenciement et la perte de leur statut”, affirmait l’organisation syndicale dans nos colonnes [cliquez ici pour consulter notre article sur le sujet : “Suspense relancé autour des procédures de licenciement des agents hospitaliers”].

Dans les faits, le projet de texte appelé à être (rapidement) publié doit détailler les modalités d’application de deux articles de la loi de 1986 instaurant un certain nombre de droits pour les personnels qui voient leur emploi supprimé. Lorsqu’un établissement public ne peut offrir au fonctionnaire concerné d’autre emploi correspondant à son grade et que celui-ci ne peut prétendre à partir en retraite, alors l’agent bénéficie d’une “priorité de recrutement sur tout emploi correspondant à son grade” et vacant dans d’autres établissements (établissements publics locaux, de santé, centres d’accueil hospitaliers).

Pour y parvenir et comme le stipule le texte législatif, l’autorité administrative est tenue de proposer aux fonctionnaires impactés par des licenciements 3 emplois vacants correspondant à leur grade “dans un délai et selon un ordre géographique fixés par Conseil d’État”. Malgré tout, six mois après la suppression de l’emploi, en cas d’absence d’emploi ou de refus de l’agent public du troisième poste proposé, celui-ci est licencié. Autant de dispositions qui ne sont donc toujours pas applicables depuis plus de trente ans, faute de décret en Conseil d’État. Celui-ci doit maintenant détailler l’ordre de priorité géographique des reclassements et le délai de réflexion laissé au fonctionnaire dont l’emploi a été supprimé “pour accepter ou refuser un poste ou pour demander sa disponibilité”.

Motion syndicale

“La concertation qui sera prochainement lancée permettra de s’assurer des garanties apportées aux fonctionnaires hospitaliers dont l’emploi serait supprimé”, indique dans son courrier la DGOS, Cécile Courrèges. Et d’ajouter en direction du secrétaire général de la branche “Santé” de Force ouvrière : “J’espère que votre organisation syndicale, ainsi que les autres organisations syndicales de la fonction publique hospitalière, apporteront leur expertise à ces travaux afin qu’un dispositif conforme au droit mais également attentif à la situation des agents susceptibles d’être concernés soit mis en place.”

Une invitation qui ne recueille d’ores et déjà pas un accueil enthousiaste de la part de la fédération de Force ouvrière. En réaction à ce courrier, cette dernière a tenu à rappeler son opposition aux “intentions du ministère” concernant l’éventualité de la publication d’un décret et invite même l’ensemble de ses syndicats à adresser à la ministre Agnès Buzyn une motion “contre tout décret organisant les licenciements de fonctionnaires hospitaliers”. Le tout en mettant en copie la DGOS et chaque agence régionale de santé (ARS).

“La fédération et ses syndicats ne laisseront pas le gouvernement prendre une telle disposition qui sera un outil supplémentaire pour accélérer les restructurations hospitalières et attaquer l’emploi”, précise FO. Le tout, rappelle le syndicat, “comme en 1998”. Il y a dix ans, en effet, la ministre de l’Emploi et de la Solidarité d’alors, Martine Aubry, et le secrétaire d’État chargé de la Santé placé à ses côtés, Bernard Kouchner, avaient tenté de publier le décret d’application sur les procédures de reclassement, voire de licenciement des agents hospitaliers. Ces derniers l’avaient inscrit à l’ordre du jour d’un Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière de juillet 1998, avant de faire machine arrière suite à une mobilisation syndicale. Bis repetita ? Pas sûr. À cette époque, le Conseil d’État n’avait pas adressé d’injonction au gouvernement Jospin.