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Réunion à l’Élysée : pour FO, opposer salaires et emploi serait "la plus mauvaise réponse" à la crise

La réunion à laquelle le président de la République avait convié les partenaires sociaux, dont la confédération FO, ce jeudi 4 juin, au Palais de l’Élysée, a duré près de trois heures. L’objectif de cette initiative était de commencer à "travailler à ce qui peut être fait pour préserver l’emploi et l’accompagnement des plus fragiles, notamment les jeunes entrant sur le marché du travail", avait indiqué la présidence.

Outre le Premier ministre Édouard Philippe et la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, plusieurs autres membres du gouvernement entouraient le Président Emmanuel Macron pour accueillir les partenaires sociaux, ce 4 juin, à l’Élysée : Bruno Le Maire ministre de l’Économie et des Finances, Gérard Darmanin ministre de l’Action et des Comptes publics, Didier Guillaume ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation et Laurent Pietraszewski, secrétaire d’État auprès du ministre de la Santé et des solidarités, chargé de la protection de la santé des salariés contre l’épidémie de Covid-19.
Nouvelle donne ?

À l’issue de la réunion, qui a duré près de quatre heures, la ministre du Travail a annoncé que plusieurs chantiers (assurance-chômage, chômage partiel, emploi des jeunes, formation, régulation du travail détaché) feront l’objet de concertations entre le gouvernement et les partenaires sociaux dans les prochaines semaines. "L’enjeu" est de "sauver l’emploi", de "bâtir une nouvelle donne" a-t-elle souligné.

De son côté, le secrétaire général de la confédération FO Yves Veyrier a déploré qu’il n’y ait pas eu "d’annonce du tout" sur le sujet des salaires, déclarant "être resté complètement sur sa faim."
Pour FO, la question est en effet déterminante, y compris pour la relance économique et donc la sauvegarde de l’emploi. "Opposer les salaires à l’emploi serait la plus mauvaise réponse à apporter", avait déjà déclaré Yves Veyrier en début de semaine, expliquant craindre un chantage à l’emploi pour imposer des baisses de salaire.

De fait, le gouvernement a multiplié ces derniers jours les appels à mettre en place des "accords de performance collective" dans les entreprises. Créé par les ordonnances de 2018 réformant le code du Travail, l’accord de performance collective permet d’aménager la rémunération, la durée du travail et la mobilité interne des salariés au motif de préserver l’entreprise et l’emploi. Cela permet "de se dire “plutôt qu’il y en ait 20% qui perdent leur emploi, on va pendant quelques temps baisser le temps de travail, donc la rémunération“" avait vanté la ministre du Travail en début de semaine.
Pour FO, "ce n’est pas aux salariés de se serrer la ceinture"

C’est dans ce contexte que la confédération FO a réitéré sa position de défense des salaires à l’occasion de cette réunion à l’Élysée. "Avec la modération des salaires, on risque un effet récessif alors qu’il faut soutenir l’activité et donc la demande, à fortiori parce qu’on prône une relocalisation de l’activité" avait aussi expliqué Yves Veyrier sur BFM TV, quelques heures avant le début de la rencontre à l’Élysée.

Lors de cette interview, le secrétaire général de FO a notamment souligné : "Il faut donc soutenir le pouvoir d’achat, quoi qu’il en coûte, à commencer par celui des professions dont on a découvert tout à coup leur rôle essentiel dans la société et qui sont en règle générale payés au Smic ou à peine au-dessus. Je rappelle que le salaire médian en France est à 1800 euros, net, c’est-à-dire que la moitié de la population gagne un salaire net en dessous de 1800 euros. Ce n’est pas aux salariés de se serrer la ceinture mais aux actionnaires, aux plus riches."
FO a réitéré sa demande d’abandon de la réforme de l’Assurance chômage

Pas moins de 843 000 demandeurs d’emplois supplémentaires ont été enregistrés entre mars et avril sur l’ensemble du territoire, soit une hausse de 22,6% sur un mois et de 30,3% depuis la fin janvier, ce qui porte à 4,575 millions le nombre de chômeurs. La ministre du Travail a prédit que le taux de chômage passerait la barre des 10% cette année.

Face à cette situation, outre une politique salariale "volontariste" pour reprendre le terme de son secrétaire général, la confédération FO demande l’abandon de la réforme de l’Assurance chômage, réforme pour l’instant en partie suspendue du fait de la crise sanitaire. Une demande réitérée avec insistance ce 4 juin à l’Élysée.

Au début du confinement, le gouvernement a en effet décidé de reporter au 1er septembre le deuxième volet de la réforme qui devait entrer en vigueur le 1er avril. Il s’agit du durcissement du mode de calcul de l’allocation pour les travailleurs alternant contrats courts et périodes de chômage, en clair les travailleurs précaires.

Le premier volet entré en vigueur au 1er novembre 2019, lui, n’a pas cessé de s’appliquer. Il durcit les conditions d’accès à l’indemnisation du chômage, puisqu’il faut désormais avoir travaillé 6 mois sur les 2 dernières années pour y avoir droit au lieu de 4 sur les 28 derniers mois avant la réforme .
Le gouvernement pourrait prolonger la suspension de certaines dispositions de la réforme

Des discussions sur l’Assurance chômage vont s’ouvrir "dans les semaines qui viennent" avec les organisations syndicales et patronales en vue de parvenir à des décisions "d’ici l’été", a annoncé la ministre du Travail à l’issue de la réunion à l’Élysée. "Les choses sont très, très ouvertes" (sur cette question ndlr) a-t-elle souligné. "Il y a probablement certains sujets" (de cette réforme ndlr) "qui sont inapplicables aujourd’hui, ou en tout cas pas applicables à une date rapide", a-t-elle ajouté.

Il ressort de la réunion que le gouvernement "pourrait poursuivre la suspension de certaines dispositions de la réforme.", a résumé le secrétaire général de FO.
Quid du chômage partiel ?

Des concertations avec les partenaires sociaux devraient commencer dès la semaine prochaine sur la question du dispositif de chômage partiel, le gouvernement se fixant pour objectif d’aboutir à un résultat d’ici le 15 juin.

"L’État ne peut pas durablement prendre en charge les salaires de millions de personnes dans le secteur privé", a fait valoir la ministre du Travail, jugeant "nécessaire" de créer "un dispositif spécifique d’activité partielle mis en place par un accord collectif d’entreprise ou de branche".

Alors que 8 millions de salariés sont déjà aujourd’hui en chômage partiel, la confédération FO appelle, elle, à "ne pas relâcher l’effort".
Emploi des jeunes : le gouvernement donne la priorité à l’apprentissage

Le gouvernement se donne jusqu’à la mi-juillet pour élaborer son plan sur l’emploi des jeunes mais a d’ores et déjà ouvert le chantier de l’apprentissage.

La ministre du Travail a ainsi annoncé que du 1er juillet au 28 février, toutes les entreprises qui recruteront un apprenti bénéficieront d’une aide à l’embauche de 8.000 euros pour les apprentis majeurs et de 5.000 euros pour les mineurs (actuellement l’aide ne peut dépasser 4125 euros et est réservée aux entreprises de moins de 250 salariés).

De plus, alors que cette aide n’est accordée que pour l’embauche de diplômés au niveau inférieur ou égal au bac, le dispositif sera élargi jusqu’au niveau de la licence.

La première année d’apprentissage aura un "coût quasi nul" pour une entreprise qui recrutera un apprenti de moins de 21 ans, a argué la ministre du Travail. La première année, le salaire d’un apprenti est de 416 euros pour les moins de 18 ans et de 662 euros pour ceux âgés de 18 à 20 ans (grille des salaires de 2020). Pour le recrutement d’un apprenti âgé de 21 à 25 ans (le salaire est de 816 euros la première année), cela représentera un reste à charge d’environ 175 euros par mois, a précisé Muriel Pénicaud.

Pour laisser davantage de temps aux jeunes pour trouver une entreprise avec la crise, ceux-ci pourront rester jusqu’à six mois en Centre de formation des apprentis (CFA) sans contrat, au lieu de trois mois actuellement.
Autres chantiers ouverts : la formation, le travail détaché et la sous-traitance

"Que ce soient les salariés en chômage partiel ou les demandeurs d’emploi, il faut permettre à chacun d’utiliser cette période difficile comme une occasion de rebond et de développement des compétences extrêmement nécessaires demain en matière numérique, de transition écologique, d’aide aux personnes…", a expliqué la ministre du Travail. D’où l’annonce d’"une discussion avec les partenaires sociaux" pour examiner "comment mobiliser les instruments existants" (en matière de formation ndlr), "quitte à les modifier".

Enfin, le gouvernement est disposé à discuter avec les partenaires sociaux d’une meilleure régulation du travail détaché ainsi que des mesures à prendre pour clarifier les relations entre les entreprises donneuses d’ordre et leurs sous-traitantes, notamment en termes d’emploi et de chômage partiel.

Sur ce dernier point, la confédération FO souligne la nécessité de mieux contrôler l’attribution des aides publiques, de façon à ce que les grandes entreprises donneuses d’ordres ne captent pas ces aides à leur seul profit, aux dépends des sous-traitants, qui sont bien souvent de petites entreprises en grande difficulté.