Section du TARN-ET-GARONNE
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Réingénierie des processus ou TOYOTAMANIA ?

Il en est question lors des réunions avec la Direction locale, le maître mot maintenant c’est la réingénierie des processus, baguette magique qui va compenser les suppressions d’emplois !

Mais « rassurez-vous », cette invention n’est pas récente et ne concerne pas que la DDFIP de Tarn et Garonne, à priori elle s’étend même aux préfectures (cf. article du Canard Enchaîné au verso).

Pas récente car créée en 1972 et appliquée dans les usines TOYOTA pour améliorer la production et produire des voitures en petites séries à un prix compétitif. Lean signifie « maigre », c’est-à-dire mettre au régime, comme l’explique très bien le cabinet de conseil Talisker Consulting :

« La traduction de lean, littéralement "maigre" incite à ce mauvais jeux de mots qui n’est toutefois pas dénué de sens. En effet, comme il est possible de parler de leantime ( période de "vache maigre"), il est possible d’appréhender le Lean Management comme le moyen de réduire le poids d’une organisation et ainsi la rendre plus manoeuvrable, et donc finalement lui permettre de s’ajuster plus rapidement en cas de changement de contexte. les entreprises ou directions faisant face à des réduction budgétaire, alors que leurs structure et leur investissement passés consomment obligatoirement une part importante de ces budgets, voient facilement l’interêt de changer leurs méthode de travail et vite »

Le Lean Thinking consiste à redessiner les processus complexes pour permettre aux entreprises à se repositionner, à améliorer leurs performances, leur gestion de coût et de revient, ainsi que la sécurité et la flexibilité de leurs procédés de production.
5 principes :

• Etablir l’utilité ou le produit ou service désiré par le client.

• Comprendre le processus de production.

• Améliorer le circuit ou la trajectoire de production.

• Le client au centre des préoccupations.

• Viser la perfection.

Il s’agit donc d’appliquer au service public des méthodes du privé, et des méthodes de production plutôt capitalistes !

Qui est le « client » d’un service public ?

L’usager, le citoyen a des droits vis-à-vis de nos services, mais ceux-ci sont-ils variables en fonction de sa participation au fonctionnement du service public à travers l’impôt ?

Un client aura plus d’égard et plus de services d’une entreprise privée s’il est un « gros » client. Doit-on adapter cette façon de faire au service public qui, pourtant, a été créé pour pouvoir donner accès à tous à
un service égal ?

Par ailleurs, le citoyen a aussi des devoirs qui lui incombent, comme le fonctionnaire et une règlementation nationale à respecter : Lois, ordonnances etc.

Si tout ceci doit évoluer, ne serait-ce pas plutôt le rôle du Parlement ?
Alors, pourquoi insidieusement le gouvernement lance-t-il cette réingénierie des processus, accompagnée de groupes expressions métiers avec la participation des agents ?

Pour éviter tout débat sur l’évolution du service public

Evolution rendue nécessaire par les suppressions d’emplois idiotes dans nos services car ne reposant sur rien d’autre que des effets de surenchère, mais qui génèrent beaucoup de dysfonctionnements.

Un des nombreux dysfonctionnements : les missions ne sont plus remplies à leur juste valeur, et s’il faut rendre compte des objectifs assignés, on décide d’abandonner certains contrôles car trop lourds, et
« rapportant » peu !

Egalité de traitement du citoyen : c’est un voeu pieu qui n’est plus un voeu de notre administration !!!
Certains seront plus égaux que d’autres en droit !

Un autre et pas le moindre, c’est le stress ressenti par les agents qui tiennent à remplir leurs missions, et qui ont dû subir depuis plusieurs années des réformes incessantes, des fusions de services, des applicatifs nouveaux à intégrer, tout ceci avec moins d’emplois.

Il faut leur dire qu’il faut qu’ils simplifient leurs méthodes, car ils travaillent comme il y a 20 ans, qu’il leur faut évoluer, et qu’ils peuvent venir décider de leur avenir dans des groupes expressions métiers !

Il faut intégrer les agents dans la démarche pour éviter l’unique responsabilité hiérarchique de l’échelon le plus élevé (Ministère) en cas de grave problème comme dans certaines entreprises publiques.

A Force Ouvrière, nous ne voulons pas d’un service public au service d’intérêts privés.

Nous voulons un service public fort et indépendant garant de la démocratie, et non pas suspendu aux influences de puissances privées.

C’est pourquoi les suppressions d’emplois doivent s’arrêter, et c’est pourquoi il faut refuser le Lean management. Participer à des groupes d’expressions métiers qui ne visent qu’à étriquer davantage encore
nos services c’est de l’autodestruction !

La réingénierie des processus : NON, l’arrêt des suppressions d’emplois : OUI !


« Ni Préfet ni à faire
On ne rigole pas tous les jours au ministère de l’Intérieur en pleine réforme ! Une note absconse et solennelle du 19 octobre, signée du directeur de la Modernisation et de l’Action territoriale Jean-
Benoît Albertini, a pour objet la « réingénierie des processus de production (méthode Lean) ». Lean, comme David Lean, l’inoubliable réalisateur de « Lawrence d’Arabie » ?

Pas tout a fait : « Inscrite dans la directive nationale d’orientation (paragraphe 3.5), la réingénierie des processus de production constitue l’un des enjeux majeurs des préfectures pour la période 2010-2015. Elle s’opère grâce à une méthode (Lean) qui vise a améliorer l’organisation du travail quotidien des services et à offrir une prestation de qualité aux usagers avec des moyens contraints. Elle repose sur le
management participatif et la mise en place d’un dialogue de performance au sein des équipes. »

En clair, il s’agit de travailler mieux, avec moins de moyens, tout en se concertant. Elémentaire ? Pas du tout ! La méthode Lean (« maigre », ou « allégée » en anglais) est en fait une méthode de
dégraissage à visage humain, mise au point dans les usines Toyota en 1972 pour rationaliser et accélérer le travail des ouvriers fabriquant des bagnoles ! Or il s’agit, d’après la note, d’appliquer ce « process » industriel, concurrent du taylorisme, aux procédures administratives de naturalisation, et de l’étendre à la délivrance des titres de séjour.
« Ainsi, une gestion maîtrisée des stocks et des délais des demandes d’autorisation de séjour permettra une prise en compte plus aisée de la reforme applicative d’AGDREF2 dont les conditions de déploiement sont en cours de définition. » Naturellement : on allait le dire.

Dernier point crucial : ne pas négliger « le rôle des animateurs du changement dans l’amélioration du processus séjour ». C’est-à-dire, en clair, le rôle des malheureux fonctionnaires chargés d’implanter cette
grande réforme.

Ouf ! Ce qui est bien, c’est que même en intégrant des super-techniques d’automatisation nippoaméricaines, l’administration française continue à tout noyer dans son charabia rassurant. »

Le Canard Enchaîné du 29-12-2010