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- Article publié le 10/09/2015
Le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu : les 9 arguments de l’opposition de Force Ouvrière.
On assiste, une fois de plus, au retour au débat sur le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu orchestré par le Premier ministre lui-même. Ce débat n’est pas nouveau. Force Ouvrière a combattu ce projet et a démonté un à un les arguments fallacieux évoqués pour sa mise en place. Véritable serpent de mer, il est présenté comme une simplification du système fiscal, et le moyen d’éviter une relation « percepteur/contribuable » douloureuse pour ce dernier ! En fustigeant une survivance française présentée comme archaïque pour converger vers l’uniformisation européenne, on veut en réalité accélérer la réduction des finances publiques, saborder les services publics et mettre les salariés en situation de dépendance totale auprès de leurs patrons. Force Ouvrière a toujours rejeté le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu qui s’inscrit dans les prérogatives de puissance publique de l’Etat.
Dire qu’il s’agit d’un système moderne relève de l’amnésie ! Force Ouvrière rappelle que la mise en place de la retenue à la source de l’impôt sur le revenu, n’aurait rien de révolutionnaire mais nous transporterait dans le temps, à l’époque de l’impôt cédulaire au taux de 15 % qui frappait les seuls salaires et qui a été supprimé en 1948 afin d’éviter une hausse des salaires du même niveau.
Dire qu’il supprimerait la déclaration n’est pas sérieux Celle-ci serait maintenue car il y aura toujours nécessité :
•pour le contribuable de justifier de l’ensemble de ses revenus, seul moyen de regrouper toutes les ressources du ménage : ce n’est pas un barème de prélèvement direct qui pourrait prendre en compte les charges familiales. A moins qu’un trait soit définitivement tiré sur le principe constitutionnel et républicain de la progressivité de l’impôt, comme d’ailleurs cela se pratique déjà pour les revenus financiers avec le prélèvement libératoire ;
•pour l’administration fiscale (la DGFiP), d’une obligation de contrôle et d’émission de rôles pour déterminer les compléments d’impôt dus et le trop perçu éventuel à rembourser.
En fait, le prélèvement à la source recouvre deux objectifs, soigneusement dissimulés : si le premier est de rendre l’impôt indolore, peut-être pour l’augmenter plus facilement mais aussi pour diluer le contrôle démocratique des dépenses de l’Etat par le contribuable citoyen, le second vise tout simplement, par la remise en cause de l’impôt progressif, à abaisser celui des plus hauts revenus. Or, tout contribuable peut adhérer au prélèvement mensuel de l’impôt sur le revenu en ayant la possibilité de moduler ses mensualités en fonction de l’évolution de sa situation fiscale. En 1981, si le taux d’adhésion à ce système représentait 30 % des contribuables, en 2012 plus de 70 % des contribuables assujettis à l’impôt sur le revenu ont opté pour la mensualisation (avec cette différence fondamentale que l’impôt rentre immédiatement dans les caisses de l’Etat au lieu d’attendre, plus ou moins longtemps, le reversement des prélèvements opérés par les entreprises sur les salaires). Ces chiffres sous-entendent, malgré la progression de l’option, que de nombreux contribuables français ne souhaitent pas encore entrer dans un système de perception automatique mensuel de leur impôt sur le revenu.
Ce serait un cadeau déguisé aux entreprises Transformer les entreprises en « percepteur », et il s’agit sans doute là du côté le plus scandaleux du système, c’est sans doute leur imposer des frais de gestion supplémentaires, mais c’est aussi et surtout leur donner de très importants moyens de trésorerie, comme c’est d’ailleurs le cas pour les retenues sociales ouvrières avec le différé considérable de règlement à l’Etat et aux caisses sociales des sommes retenues en fin de mois sur la paye des salariés. Coût démesuré supporté en définitive par l’Etat pour prix d’abandon de responsabilité régalienne ! Comme actuellement, pour les retenues sociales, des problèmes de pertes d’encaissement ne manqueraient pas d’apparaître en cas de difficultés financières ou de disparition de l’entreprise devenue collecteur d’impôt sur le revenu.
Ce serait un moyen de pression donné aux employeurs sur les salariés Des difficultés de recouvrement ne manqueraient pas d’apparaître et porteraient sur des sommes pouvant atteindre des volumes financiers considérables, sans oublier la technique du chantage à l’emploi. Alors que le MEDEF ne cesse de dénoncer le poids des charges salariales, oubliant que la rémunération comprend aussi les cotisations sociales constitutives du salaire différé, est-il opportun de donner aux employeurs un moyen supplémentaire pour accentuer la pression sur les salariés par la modération du bas du bulletin de paye ?
Le prélèvement à la source aggraverait l’injustice fiscale : il imposerait une aggravation massive du prélèvement sur les revenus, principalement sur les salaires et les retraites, aggravation provoquée par le transfert des charges patronales sur les ménages. La méconnaissance des revenus réels non salariaux aurait pour conséquence une pression fiscale pesant essentiellement sur les salariés et les retraités dont les revenus sont connus. Les salariés et les retraités seraient les seuls à régler leur impôt immédiatement et au comptant : leur pouvoir d’achat serait ainsi aussitôt amputé. Les professions non-salariéss n’acquitteraient leur impôt que bien plus tard, et pourraient ainsi bénéficier de l’érosion monétaire et des possibilités de placements financiers pendant le différé de versement.
L’atteinte à la responsabilité civique Faire croire aux contribuable qu’il paierait son impôt sans douleur, ce serait endormir sa responsabilité de citoyens en lui dissimulant le poids d’une contribution qu’il a pour devoir d’acquitter pour le financement des charges communes du pays, que représentent la solidarité nationale et les services publics.
L’accélération du désengagement budgétaire La suppression d’une mission régalienne dévolue par la loi à la Direction générale des finances publiques, entraînerait dans un premier temps le reclassement des agents en fonction, puis la disparition des emplois correspondant au recouvrement de l’impôt sur le revenu. L’opération se traduirait par un gain budgétaire significatif au détriment du service public et de ses agents.
Et poserait le dilemme du changement de système : il serait nécessaire d’expliquer aux Français comment passer d’un système à un autre. De deux choses l’une : ou bien le contribuable serait mis en obligation de payer deux années d’impôt la même année ou bien l’Etat accepterait d’abandonner une année d’impôt. Il ne s’agit pas là d’une question mineure car avec l’abandon d’une mission régalienne et d’un principe constitutionnel d’égalité des citoyens devant le recouvrement de l’impôt, ce serait un pas de plus accompli vers l’affaiblissement de notre République.
Force Ouvrière a, pour toutes ces raisons, toujours rejeté le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu et est bien décidé à continuer ce combat.
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