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Feu vert réglementaire pour l’administration proactive

Un décret a été publié le 11 mai pour autoriser l’échange, entre administrations publiques, d’informations concernant les usagers pour les informer proactivement de leur éligibilité à une prestation ou une aide et leur attribuer automatiquement. C’est le coup d’envoi de l’”administration proactive” promise par l’exécutif depuis 2 ans dans le prolongement du “Dites-le-nous une fois”.

C’est une petite révolution pour le service public. Depuis ce week-end, les administrations peuvent enfin anticiper les besoins de leurs usagers pour les informer de leur éligibilité à un droit ou une aide. Sans attendre qu’ils en fassent la demande, ni qu’ils aient à envoyer toujours les mêmes justificatifs. Une manière de prolonger le "Dites-le-nous une fois", qui permet de pré-remplir les formulaires administratifs, mais aussi d’accélérer l’instruction des dossiers et de lutter contre le non-recours.

Deux décrets d’application de l’article 162 de la loi 3DS promulguée début 2022 ont été publiés au Journal officiel du 11 mai.
Le premier texte autorise les administrations à s’échanger des informations pour déterminer si leurs usagers sont éligibles à une prestation ou avantage. Et uniquement à cette fin. Le décret précise noir sur blanc que les données partagées ne peuvent en aucun cas être réutilisées “pour la détection ou pour la sanction d’une fraude”.
Le second décret liste quant à lui l’ensemble des pièces justificatives que les usagers (professionnels ou particuliers) n’ont plus à communiquer et que les administrations doivent donc récupérer par ailleurs.

C’est ainsi que les citoyens pourront être prévenus que leur carte d’identité s’apprêté à expirer ou qu’une bourse pourra être attribuée proactivement à un étudiant dès son inscription, sans que celui-ci n’en ait fait la demande initiale, ni même qu’il en ait connaissance au départ.

Dans ce nouveau régime de partage de données, les administrations peuvent croiser des informations produites ou collectées par d’autres administrations, comme le revenu fiscal de référence détenu par les Impôts, le quotient familial calculé par la CAF, le statut de demandeur d’emploi de Pôle Emploi, ou encore le justificatif d’identité détenu par le ministère de l’Intérieur. “Dans le cadre du code des relations entre le public et l’administration (CRPA), avant l’article 162 de la loi 3DS, les administrations ne pouvaient échanger des données uniquement pour des démarches ou déclarations initiées par l’usager”, explique une juriste travaillant dans une direction du numérique.

Cet article 162 est donc venu permettre un échange de données sans que l’usager ne soit à l’initiative d’une quelconque procédure.” Un changement a priori anodin mais qui renverse totalement la posture de l’administration, jusqu’ici relativement passive. Désormais, il lui appartient de détecter proactivement parmi ses usagers de potentiels bénéficiaires de prestations ou aides. De les en informer, puis de leur verser quasiment automatiquement, dans la mesure où les informations habituellement demandées à coups de justificatifs ont déjà été collectées et vérifiées en amont.

Chantiers à venir
Une mission “administration proactive” travaille depuis 2021 déjà sur la concrétisation de ce chantier. Sans résultats très visibles à ce stade. La feuille de route de cette mission demeure relativement floue, et les projets de démarches proactives restent à l’initiative des ministères.
Plusieurs cas d’usages ont néanmoins été identifiés, au niveau du renouvellement des titres d’identités, de la tarification sociale et solidaire des transports, de l’attribution de Ma Prime Rénov, de l’inscription sur les listes électorales ou encore du versement de la pension de réversion en cas de décès d’un proche.
Autant de projets qui nécessitent de croiser différentes sources d’informations et suscitent parfois davantage de prudence que d’enthousiasme dans les administrations, sensibilisées de longue date par un cadre légal et une doctrine de la CNIL limitant les flux de données au strict nécessaire.

La Dinum a choisi de prendre les choses en main et d’assumer une partie de l’incertitude juridique et technique en lançant un laboratoire d’expérimentation. ““Le “datalab” que nous allons créer est une réponse à ces incertitudes, en permettant à un porteur de projet de bénéficier d’un appui juridique, technique et RH, avec la mise à disposition d’experts en données. Les données nécessaires au projet pourront être traitées sur nos propres infrastructures techniques, ce qui projette la responsabilité sur la Dinum”, expliquait la directrice de la Dinum, Stéphanie Schaer dans un entretien accordé en mars dernier.

La direction a d’ailleurs ouvert en janvier un guichet dédié, dans le cadre du Fonds pour la transformation publique. De quoi financer des projets permettant de “cibler puis contacter proactivement des usagers susceptibles d’être éligibles à un droit, une aide ou une prestation, et les encourager à réaliser une démarche pour en bénéficier”, et même “idéalement” de “leur attribuer automatiquement ce droit, cette aide ou cette prestation”.

PAR EMILE MARZOLF
15 mai 2023
Acteurs Publics, Lire l’article