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Retraites - Premier grain de sable, pourtant prévisible, lors de l’examen du texte par le Conseil Constitutionnel…

Retraites : vers la censure d’une mesure sur les catégories actives de la fonction publique ?

La disposition visant à mieux prendre en compte la pénibilité subie par les contractuels et à leur permettre un départ anticipé à la retraite, contenue dans le projet de loi de réforme des retraites, est un “cavalier social”, selon les députés et sénateurs de l’opposition, qui viennent de saisir le Conseil constitutionnel. Cette mesure vise à comptabiliser, au moment de leur titularisation, les périodes effectuées par les contractuels sur des emplois de “catégories actives.” Le Conseil d’État avait déjà alerté sur le risque d’inconstitutionnalité la concernant.

Le sort du projet de réforme des retraites est désormais entre les mains du Conseil constitutionnel. Les députés de la Nupes, les sénateurs de gauche ainsi que les députés RN viennent en effet de saisir les sages de la Rue de Montpensier sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale rectificatif pour 2023 (PLFSSR), qui comporte cette réforme. Une saisine “blanche – c’est-à-dire ne comportant aucun grief particulier – a également été déposée par la Première ministre, Élisabeth Borne. Le Conseil a un mois pour se prononcer.

Sans surprise, les parlementaires de l’opposition réclament la censure totale du projet de loi, ceux-ci critiquant non seulement le contenu de la réforme, mais aussi la procédure législative, particulièrement tendue, à l’issue de laquelle elle a été adoptée. Référence à la fois au recours par le gouvernement au “vote bloqué”, à l’article 47.1 de la Constitution qui limite à 50 jours l’examen d’un PLFSS et, bien entendu, au “49.3”, qui a permis à l’exécutif de faire adopter sa réforme sans vote à l’Assemblée nationale. 

La pénibilité subie par les contractuels en question
 
Au-delà, les élus de l’opposition pointent du doigt plusieurs “cavaliers sociaux”, à savoir des dispositions qui, selon eux, n’ont pas leur place dans une loi de financement de la Sécurité sociale ou qui ont impact insuffisant, voire nul, sur les comptes sociaux de l’année 2023. Pour ces parlementaires, notamment, la mise en place d’un “index senior” ferait partie de ces “cavaliers sociaux” et devrait dès lors être censurée par le Conseil constitutionnel. Idem pour une mesure favorable à certains contractuels, qui n’a pas sa place dans le projet de loi aux yeux des députés et sénateurs de gauche. 

Cette dernière mesure, inscrite à l’article 10 du texte, prévoit de mieux prendre en compte la pénibilité subie par les agents contractuels de la fonction publique et plus particulièrement par ceux ayant exercé des fonctions équivalentes à celles des fonctionnaires relevant des catégories actives, lesquels bénéficient aujourd’hui d’un départ anticipé à la retraite (sapeurs-pompiers, égoutiers, infirmiers, policiers, surveillants pénitentiaires, contrôleurs de la navigation aérienne…). 

Contrairement à la situation actuelle, si la réforme était mise en œuvre, les périodes effectuées sur des emplois “actifs” ou “superactifs” en tant que contractuel seraient prises en compte au moment de la titularisation d’un agent contractuel. Et ce dans la limite de dix ans pour remplir la condition de durée en services actifs ou superactifs (dix-sept ou vingt-sept ans) permettant un droit au départ anticipé à la retraite. Une mesure introduite dans le projet de loi par le gouvernement pour, d’une certaine manière, compenser le report de deux ans de l’âge légal de départ à la retraite. 

Un impact financier lointain

Ces dispositions, pointent néanmoins les parlementaires de gauche, ne s’appliqueraient qu’à partir des “services” accomplis par lesdits contractuels au moment de la publication de la loi, soit dans quelques mois si la réforme venait à être effectivement validée par le Conseil constitutionnel, puis promulguée par Emmanuel Macron. 
Il en résulte que ces dispositions ne sauraient avoir un impact financier direct sur les régimes obligatoires de base de la Sécurité sociale pour 2023 car les services accomplis en 2023 par des agents contractuels titularisés ne feront l’objet d’une conversion que dans plusieurs années”, expliquent les députés de la Nupes dans leur saisine. 

Le constat des sénateurs de gauche est le même : la mesure “ne sera susceptible de produire un effet sur les dépenses des régimes obligatoires de base qu’une fois que l’agent contractuel concerné, ayant accompli de tels services plusieurs années après l’entrée en vigueur de la loi et étant devenu ultérieurement titulaire, demandera la liquidation de sa pension de retraite.”
 
Alerte préalable du Conseil d’État 

S’ils reconnaissent que cette disposition “crée de nouveaux droits pour les agents publics contractuels”, les députés de la Nupes la considèrent malgré tout comme un “cavalier social” qui en tant que tel, selon eux, doit être censuré par les sages de la Rue de Montpensier. Une lecture partagée par les sénateurs de gauche. 
L’avenir de cette disposition favorable aux contractuels est donc aujourd’hui en sursis, d’autant plus que le Conseil d’État avait déjà alerté le gouvernement sur son risque d’inconstitutionnalité.

Révélée par Le Monde fin février, la note du Palais-Royal sur le projet de réforme des retraites (qui n’a pas été rendue publique) suggérait en effet à l’exécutif de retirer du texte cette mesure de prise en compte de la pénibilité subie par les agents contractuels, cette mesure pouvant être regardée comme un “cavalier social.” Si ladite mesure venait à être censurée par le Conseil constitutionnel, le gouvernement serait prêt à la réintégrer dans le prochain budget de la Sécurité sociale, celui de 2024. (sic)

Par Bastien Scordia, Acteurs Publics le 28 mars 2023